Ce qui suit est un genre de conte à l’envers. En prose
et non en vers.
Qu’aux enfants on ne racontera pas.
Jadis, dans nos livres
d’histoires, la fée changeait les crapauds et les grenouilles en Princes
Charmants et en Princesses. La belle époque du recyclage !
Oui, mais c’était
autrefois, il y a bien longtemps, quand régnaient encore les rois. Et que les
fées ne craignaient pas de mouiller la chemise.
Dans le récit qui va suivre
– très prochainement, je rassure les
impatients – la fée qui n’est pas une
sorcière (un peu quand même) n’est pas bonne, du tout. Elle refuse la
concurrence, nulle ne doit être plus belle qu’elle ; un très vilain
caractère, jalouse et colérique. Personne n’aurait eu idée, même en ces temps
reculés où on ne s’embarrassait pas de préjugés, de l’embrasser sur la bouche
ou la serrer tendrement dans ses bras. La dite fée ne l’aurait ni admis ni
permis. Ni bisou, ni bibi, nenni.
Avec sagesse et par
prudence – le fameux principe de
précaution - on l’évitait.
Pour faciliter la suite,
cette maléfique, nommons-la : Fée-Pas-De-Quartier. Et par commodité, afin
de gagner un temps qui à tous est précieux : FPDQ. Comme plus tard, DSK et NKM.
CQFD.
Un jour, FPDQ (voir plus haut) se
baladant dans les bois, croisa une ravissante créature (naturellement il
s’agissait d’une jeune femme de haut rang, une princesse en recherche de
fraises des bois) si belle qu’aussitôt elle tempêta devant tant d’impertinence
en sa présence :
« C’est me faire
grave affront et bien grand tort ! » s’exclama-t-elle, furibarde.
Sa baguette pliante ou
coulissante – on ne le sait pas exactement - de chez Bricorama, déplia et
dégaina. Et la juvénile innocente beauté profondément dans sa chair toucha.
Dans le bois et sur le champ, elle décida de changer la jeunette en une laide
bestiole. Crapaud ou grenouille. Oust, vers les étangs et les mares.
Le crapaud convenant mieux
à un prince, elle opta pour la grenouille.
Las, FPDQ (toujours elle)
avait oublié sur un coin de cheminée son manuel de sorcellerie. N’ayant pas de
modèle à consulter, elle œuvra de mémoire, qu’elle n’avait plus excellente, et
n’étant pas émérite artiste, donna maladroitement dans l’à-peu-près.
« Ouille ouille ouille,
cette bouille qui flanque la trouille !
Ça une grenouille ?
Non, une citrouille... Ma pauvre mère ne reconnaîtra jamais son enfant qui si
innocemment filait la quenouille. »
Et de fermer les yeux et
s’immobiliser à jamais, pétrifiée, là où le mauvais sort l’avait jetée, en
place publique pour toujours. Statufiée.
A Avalon, tout un
chacun peut juger du peu flatteur résultat.
Les passants, adultes,
militaires ou pas, enfants de troupe ou pas, traditionnellement lui rendent
visite. Avec tendresse mais sans toujours tenir compte de son rang et de sa
dignité - la république a fait grand tort à la noblesse.
Irrespectueusement on la
coiffe de chapeaux plus ou moins rigolos, l’affuble de lunettes ou autres
accoutrements excentriques.
Ultime outrage : les
caresses polissonnes, prétexte à la polir et lustrer, de manants aux mains
fouineuses sur les nobles fesses de princesse, une pudique qui de son vivant
fuyait les pince-fesses. Sacrilège !
Diana, car la princesse se
prénommait Diana, vraiment ne méritait pas cette piteuse fin avec tous ces
zouaves indélicats qui cherchent activement son tunnel.
Moralité en forme
d’avertissement :
Lecteur si vous connaissez
une princesse, avertissez-la du danger qu’il y a de cueillir des fraises dans
les bois.
Si elle est jeune et jolie.
Pour les plus vieilles, ce
sera selon votre choix.